Interview Shan Millan

Pétillante et réservée à la fois, la très choupimimi Shan Millan a accepté d'inaugurer une nouvelle catégorie de billets : les interviews dans lesquelles c'est moi qui fais causer les gens.
Je n'imaginais pas un instant qu'elle refuserait, notez. Il se trouve que je connais l'auteur de Damien Loch (roman paru aux éditions Midgard) depuis dix ans, ce qui facilitait la recherche de questions adaptées. Bah oui, les interviews "classiques", plein de gens les font déjà très bien. Tout l'intérêt de la présente rubrique est de m'y prendre à ma façon.
Bref, c'est parti pour une causette entre copines.


Oph- Shan, je t'ai connue lutine facétieuse, enchanteresse celtique, princesse de la crêpe, je te retrouve auteur chez Midgard... Qui es-tu vraiment ?

Shan- Peu importe ce que je dis de moi, ça sera démonté et remonté, alors hum... je suis un meuble en kit qu'on n'a pas fini de monter. Une version expérimentale avec trop de bouts, plein d'oppositions : asociale qui n'a pas de souci pour être sociale, sociopathe qui n'a pas de souci pour se fondre chez les humains, bavarde qui apprécie de ne rien dire pendant des heures, enfin bref, un assemblage possiblement foireux mais avec (j'espère bien !) un bon fond, et une envie sans cesse de rajouter des bouts à mon meuble ou de réparer les cassés, en découvrant de nouvelles personnes, de nouveaux univers. Bon, ça fait long comme ça, mais je t'assure que c'est plus concis que si je devais répondre en déballant tout ce que je fais et aime dans la vie, on y serait encore demain et le lendemain, il faudrait que je te fasse une nouvelle mise à jour ^^ !
(Mais la réponse officieuse et la plus honnête est bien sûr : je suis un poulporouquette. Une race très particulière venue d'ailleurs et dont je ne peux en dire plus sans risquer l'exil. Je vais donc en rester sur ma première réponse bien plus mainstream et passe-partout, et nous statuerons que cette mention de poulporouquette a été faite dans un état second et que nous ne saurions l'accepter)

Oph- Et donc un jour, tu t'es enfuie du laboratoire secret d'IKEA avec Damien Loch sous le bras. C'est une histoire que tu portes en toi depuis toujours, ou quelque chose d'un peu moins ancien que tes textes du bon vieux temps (wink wink) ?

Shan- (*Nudge nudge*) Quand j'ai commencé Damien Loch je n'avais aucune idée d'où j'allais. Et ça me semblait tout neuf. Mais en avançant l'écriture, je me suis rendue compte petit à petit que l'heure de l'originalité n'était pas encore venue pour moi, et qu'en fait j'étais en train d'écrire une histoire, comme tu dis, "que je portais en moi depuis toujours", ou peut-être pas mais dans le genre. Plus vieille même que mes histoires du bon vieux temps. J'ai donc petit à petit réinséré cette vieille histoire, mais aussi des thèmes et des univers qui m'ont toujours été chers et dont je n'avais jamais réussi à faire quoi que ce soit jusqu'à présent (il faut dire que j'avais pris ça sous le mauvais angle. Ces thèmes étaient sérieux, et j'avais donc essayé de les intégrer dans une histoire sérieuse. Très mauvaise idée me concernant...).
Finalement, avec Damien Loch, j'ai pu constater que tout s'emboîtait soudain tout seul (encore une manœuvre d'IKEA ça) : les vieux thèmes chers, la vieille histoire obsédante, les rêves à la mords-moi-le-nœud, les influences et références... et vu que c'est assez rare quand ça se produit, je ne me suis pas posé de questions et j'ai foncé là-dedans.
Pour spoiler un peu et être plus exacte : cette vieille histoire en fait m'a servi de passé pour Damien Loch. Ce n'est donc pas tant que je la raconte mais plutôt que j'ai décidé de la continuer, de repousser le mot "fin" et d'imaginer que je retrouvais les personnages maintenant, dans le monde moderne, après ce passé commun qu'ils ont vécu et tout ce qui leur est arrivé entre temps. Qu'est-ce que ça donnerait aujourd'hui ?
Finalement, la vieille histoire existe bien dans un coin mais je ne sais pas encore si je la dévoilerai dans le roman (peut-être par bribes ?), elle n'est plus si importante maintenant pour moi.

La dédicace de Shan sur mon exemplaire de Damien Loch.

Oph- Diantre ! Tu veux dire qu'il y aura une suite ?

Shan- Mais tout à fait ! Car j'ai beau être cruelle, sadique et méphistophélique, je suis aussi bassement vénale. La lutte a été rude entre : "Laisser le lecteur sur sa faim, hinhinhin ! Qu'il souffre, que c'est vil !" et "Mais, si je fais un tome 2, ça me fera de quoi mettre du confit d'oignons dans ma salade :o ! Sacrebleu, je ne peux pas laisser passer cette chance." Et j'ai donc décidé finalement de publier la suite (qui est déjà partiellement rédigée).

Oph- Une seule suite ? Tu ne te lances pas dans une saga en quatorze tomes ?

Shan- L'histoire est arrêtée depuis longtemps dans ma tête, je sais où elle va et quand elle se termine, aussi je suppose grossièrement qu'un 2e tome suffira pour conclure. Peut-être que ça ne sera pas le cas si je développe un peu le passé, mais ce qui est sûr c'est que non, ça ne sera jamais une saga de quatorze tomes ou plus. Au maximum, et uniquement si je me mets à vouloir raconter plus que nécessaire, on pourra atteindre 4 tomes mais ça me paraît beaucoup. Ce n'est pas une histoire avec des implications sans fin, je me centre sur une intrigue principale, qui a sa résolution. Certes, il pourrait y avoir d'autres choses à développer et j'ai de nombreux personnages secondaires que j'aime bien, mais je préfère me centrer sur l'intrigue que je raconte là, précisément. D'un côté je suis attachée à ces personnages et cet univers donc je pourrais bien écrire des pages et des pages là-dessus (je l'ai fait d'ailleurs mais ça, ce sont des textes qui n'apparaissent pas dans la version publiée, c'est surtout pour moi). Mais d'un autre côté, j'aurais peur je crois de ne plus savoir où je vais, et je me demanderais si j'ai vraiment quelque chose à raconter ou si je ne fais pas qu'énumérer des anecdotes, des tranches de vie quotidiennes, des encarts d'encyclopédies sur le fonctionnement de tel ou tel univers... pas vraiment ce que j'ai envie de faire.

La couverture de Damien Loch, revue et corrigée par le facétieux Olivier Gay.
(notre vengeance sera terriiiiible !)

Oph- Comment s'est passé ton travail avec les éditions Midgard ?

Shan- Très bien et très vite. Enfin j'ai trouvé. Peggy (Van Peteghem, NdOph) a commencé à lire le manuscrit en octobre 2012, a posé une option en attendant de lire la suite et une fois la lecture finie, a planifié la sortie pour avril 2013. Le rêve pour moi ^^. Des petites erreurs sont survenues au moment du passage à la maquette juste avant l’impression et je n’ai pas pu trouver le temps de relire à cette occasion le texte, ce qui m’aurait permis de corriger en plus mes coquilles et mots manquants, c’est la seule chose que je regrette mais ce n’est pas la faute de l’éditeur, plus un mauvais concours de circonstances. En tout cas, je suis très contente d'être tombée sur les éditions Midgard, et j'ai pas du tout envie d'en changer.

Oph- Une anecdote rigolote ?

Shan- Je n'ai pas encore d'anecdote rigolote en rapport avec le bouquin, mais de fil en aiguille il m'a permis plein de choses, comme par exemple te retrouver et participer à cette interview :)

Oph - Si je te laisse carte blanche pour le mot de la fin, qu'est-ce que tu veux dire aux trois pelés et deux tondus qui nous lisent ?

Shan- De lire tes livres ! Non mais, sans déconner et si ce n'est pas déjà fait, allez les pelés-tondus, au boulot là, vous allez voir, vous ne le regretterez pas ;)

Oph- Euh, eh bien, merci...

Je file rougir dans mon coin.
En attendant la suite, le premier tome de Damien Loch, de Shan Millan, est disponible depuis le mois d'avril aux éditions Midgard. Si vous aimez le "petit pas de côté" cher à Jean-Claude Dunyach, sachez que là, ce n'est pas un petit pas, mais une double vrille piquée avec réception sur les mains.

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